Notre histoire à nous

On m’avait déjà parlé de ces histoires de coup de foudre. Avec ce que j’avais dans mon bagage, j’avais un peu de mal à croire à toutes ces conneries-là. Mes espoirs en l’amour, en l’humanité même, étaient plutôt faibles. Les belles histoires n’existaient que dans mes livres d’enfants. Jusqu’à ce que je te rencontre, toi.

Après des mois de célibat centrés sur ma reconstruction intérieure, on a commencé à compiler tranquillement les archives internet de nos brefs discours échangés. J’appréhendais déjà le jour où j’irais à ta rencontre. Puis ce jour est arrivé. J’ai affronté mon cœur et ses ardeurs inexpérimentés tout en livrant un combat contre mon ennemi de toujours: la peur.

En route vers notre première rencontre, je sentais résonner en moi chaque battement de mon cœur. Je me présentais vers toi qui, au fond, m’étais encore tellement inconnu. J’étais arrivée à l’endroit que tu avais choisi et marquais le temps sur chaque minute. J’étais à l’avance de peur que tu prennes ce soir-là, le moindre retard pour insulte.

J’ai flairé ton arrivée et mon cœur obstinait cette idée. Je ne pouvais plus rebrousser chemin. Je suis sortie de ma voiture en délaissant mes illusions qui tentaient de brouiller mes émotions. C’est à ce moment que la foudre a traversé tout mon être. Je t’ai vu pour la première fois. On ne s'était rien dis encore, mais je savais que c'était toi. Je me suis sentie à la fois faible et saisie, figée d’un simple sourire en guise de bonjour. Tu m'as souris en retour et à ce moment précis j’ai ressenti, le temps d’un éclair, tout mes sens se pétrir.

Mon cœur chahutait tandis que moi, je tentais de contrôler ses battements. Je fuyais tes regards en les cherchant subtilement. Tes yeux brillaient et plus tu souriais, plus tu éradiquais mes peurs.

On s’est mis à parler sans relâche, ignorant les allées et venues du serveur impatient, qui perdait espoir en la fin de son shift! Le temps n’avait plus la même importance maintenant. Je cédais harmonieusement vers l’évocation de mon cœur, me laissant bercer par ta voix, la nuit et les douces lueurs de ce qui fut le début de notre histoire. 

Les minutes se sont enchaînées de jours et d’années. On s’est promis tant de choses sans réfléchir. Comme deux amants aveuglés par une passion qui surpasse une réalité qui dort. Quand enfin elle nous a rattrapée, l’homme de qui j’étais tombé amoureuse ce soir-là n’était plus là. Comme volatilisé dans les flots routiniers du temps qui passe à jamais. 

On a cessé de se parler, prenant pour acquis qu’on savait déjà. On a cessé de se regarder, prenant pour acquis qu’on voyait déjà. On a cessé de s’aimer, prenant pour acquis qu’on aimait déjà. Sauf qu’on ne savait rien, on ne voyait rien et on n'aimait plus.

Même si on voulait y croire, cette étincelle n'aurait pas due définir notre histoire. Celle à laquelle on s’accrochait comme seul repère du bonheur. Comme si cette journée-là pouvait à elle seule, décrire toute une vie d’amour. On se voyait parfait à travers le regard des autres. Dans leurs regards à eux, nous l'étions et ça suffisait.

Au cours des derniers mois de ce qu'on croyait notre histoire, les blessures s’accumulaient laissant nos cœurs marqués par tellement de tristesse.

Puis, j’ai fermé notre livre en inscrivant le mot fin avec une jolie calligraphie.

C'est là que j’ai appris beaucoup sur moi. Sur toi. Sur ce qui a fait que nous n’existions plus. J’ai pleuré, mais surtout grandi. À travers des histoires de séparations qui essaient de se comparer à nous, j’ai compris qu’au fond il n’y avait que toi et moi comme seuls auteurs de la nôtre.

À travers tous ces livres, remplient de ces chapitres qui constituent toutes les histoires de ma vie, j'ai choisi de mettre fin à cette histoire-là. D'y mettre fin pour me relire et comprendre ce qui avait changé ce bonheur en douleur. 

Aujourd'hui, nous avons décidé de coucher notre encre sur de nouvelles pages blanches sachant désormais que l'amour n'est pas acquis. Sachant que le temps nous guette avec ses vents et marées.

Je nous sais plus forts. Plus grands. Plus près de notre cœur duquel nous sommes désormais à l'écoute.

J'aime croire qu'on le mérite. J'aime voir à quel point nous sommes bien quand nous sommes tous les deux. J'aime le bonheur que je ressens d'écouter mon cœur au-delà de tous les jugements. J'aime tes yeux qui brillent à nouveau lorsque tu me regardes, sachant maintenant que ce n'est plus qu'un éclair, mais un sentiment profond rempli d'histoires.

Permettons-nous le pardon et laissons-nous nous aimer, guidés par l'envie d'un amour plus grand et plus vrai. Car oui, moi aussi, je t'aime toujours.

Il était une fois, notre histoire à nous.

Marie-Soleil English